Site de l'artiste : http://www.jacquesclauzel.com
Présentation de l'exposition par Anto Alquier | Entretien avec les élèves |
Exploitation pédagogique (PDF) | |
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Présentation de l'exposition (Anto Alquier) | |
Jacques Clauzel vit et travaille à Gallargues-le-Montueux dans le Gard. Formé à l’école des Beaux-Arts, il a successivement pratiqué la peinture puis la photo lorsqu’il travaillait en Afrique, l’abandonna dès son retour en France pour " replonger "dans la peinture. De nombreux ouvrages témoignent des différentes facettes de son travail et ses œuvres accompagnent les livres de ses amis poètes Des expositions prestigieuses jalonnent sa vie d’artiste.(voir son site : http://www.jacquesclauzel.com )
" La vertu du peu " prend ici tout son sens. Ce qui frappe c’est la sobriété et la simplicité. Couleurs réduites, absence de sujet, permanence du format rectangulaire vertical créent une unité calme et silencieuse. Que ce soient les peintures, les dessins ou les gravures, ce sont de grandes surfaces monochromes dans des nuances de noirs, de blancs ou de bruns qui couvrent tout le support. Pas de forme qui se détache sur un fond, pas de trouée par laquelle le regard peut s'échapper, pas de zone privilégiée qui désignerait un parcours à suivre. Nous sommes devant une surface que l’œil balaie comme une page d’écriture car on perçoit tout de suite une géométrie discrète, faite d’un quadrillage provenant de pliures du papier ou de traces laissées par la règle et un outil. Jacques Clauzel apparaît tout de suite comme un disciple de l’orthogonalité. C’est la géométrie aride de l’angle droit tiré à la règle. Pas de dérapage. Chaque trait a son début et sa fin, une existence sans bavure, une ligne de vie sans accident. Et pourtant…la surface frémit sous l’aplat de la couleur diluée. Les plis retiennent et intensifient les noirs ou les blancs, ou les ocres du brou de noix ; le papier boit les jus avec plus ou moins de soif créant des nuances et des irisations ; les traits tirés dans le frais de la peinture tracent des rais de lumière. En transparence apparaît un treillage de traits crayonnés à main levée qui se répètent et s’ordonnent avec application perpendiculairement aux lignes horizontales à moins qu’ils ne se prolongent sur toute la hauteur du tableau. Le support livre sa chair en accueillant le travail lent et régulier du peintre qui semble ponctuer le temps comme un métronome et l’étirer pour mieux le percevoir, le ressentir et le vivre. " Depuis 2002, je travaille sur le pliage, le carton d'emballage, les traces du temps, les blessures du papier. J'essaie de suivre ce que dit le matériau. Parfois, j'interviens très peu.Je travaille dans le frais, avec du papier kraft. Je plie, je déplie, j'imprègne de peinture - noir ou blanc - que je prépare minutieusement avant. Je suis les empreintes aléatoires qui apparaissent. Je rehausse ou griffe les lignes. J'enlève plus que je ne rajoute pour faire jaillir la lumière du papier. Toujours les mêmes gestes mais très précis " Les dessins sur papier de Corée, pliés et dépliés, offrent leur géométrie blanche. Au revers, des gris crayonnés soulignent les plis ou affirment la surface ; devant, des frottis de craie blanche s’accrochent sur les fibres arrachées du papier usé sous le doigt ou la gomme. C’est en scrutant l’œuvre de près que l’on discerne le dialogue étroit que le peintre établit avec le matériau qui livre ses délicates transparences et ses opalescences. Clauzel ne travaille pas sur un support, mais il travaille le support avec une parfaite justesse qui ne laisse de place ni au hasard ni à ses états d’âme. Car justement, J.Clauzel ne veut pas s’exposer : " Ce que je suis n'intéresse personne. Je refuse de mettre mes tripes sur la toile. L'important c'est l'œuvre et le cheminement. " Ce qu’il donne à voir c’est l’œuvre, seulement l’œuvre. En référence au mouvement Support-Surface : " L'objet de la peinture, c'est la peinture elle-même et les tableaux exposés ne se rapportent qu'à eux-mêmes. Ils ne font point appel à un " ailleurs " il est inutile de rechercher une quelconque divagation mentale de la part du regardeur. L’œuvre effectivement se suffit à elle-même. Le profane comme l’initié est susceptible d’être pris par sa présence, et de la ressentir jusqu’au frisson. Et c’est cette indicible rencontre que recherche le peintre. " Je ne cherche pas la retape, l'anecdotique. J'offre un travail silencieux vers lequel il faut aller. Il demande une certaine attention, de l'acceptation. Le peintre doit être exigeant avec les gens qui vont venir voir son travail. Je ne suis pas pour la facilité, ni pour cet art de la rue qui s'exhibe. C'est l'œuvre qui compte et c'est tout. Pour moi, l'artiste est un médium qui essaie de trouver le cheminement vers la chose la plus simple, donc la plus ouverte possible. Comment faire passer par l'expression plastique ce que l'on ne parvient pas à exprimer par les mots ou la musique ? Je cherche à atteindre cet indicible. " Anto Alquier |
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Entretien avec les élèves | |
Les couleurs que vous utilisez ont l’air très basiques ! Faites-vous des rajouts, des modifications, des mélanges ? Je choisis deux couleurs: le noir et le blanc car je pense que toutes les autres couleurs sont représentées dans ces deux là . J’élimine les couleurs vives. Je peins avec de la peinture acrylique dont se servent les peintres en bâtiment. J’aime les matériaux dits «pauvres» Je ne fais aucun mélange, je commence par le noir puis je superpose le blanc. Je ne fais ni rajout ni modification et je travaille «all over», c’est à dire toute la surface en même temps . Travaillez-vous sur d’autres supports que ceux utilisés pour l’exposition ? Non. Depuis 25 ans, j’utilise systématiquement du papier, du papier kraft et du carton d’emballage. Je me sers aussi du papier chiffon ou de Corée pour certains dessins et certaines gravures. Pouvez-vous nous expliquer votre intention de ne pas faire passer de message dans votre œuvre? Je ne cherche pas à m’exprimer. Je suis convaincu qu’un peintre ne doit pas montrer ce qu’il est, cela n’intéresse personne de savoir ce que j’ai dans la tête! Ce qui est important, c’est ce qui vous intéresse vous ! C’est à vous de vous projeter dans une œuvre, d’être ému ! L’artiste jette des graines personnelles puis laisse l’imagination du spectateur voir ce qu’il veut qu'elles deviennent.... L’artiste travaille dans l’indéfinissable ! Avez-vous réalisé des œuvres figuratives auparavant ? Oui ! J’ai reçu une «éducation» classique. Mais pour moi, la figuration est réductrice. Ce n’est pas l’objet qui m’intéresse mais comment il est peint. Je trouve que votre travail est très minutieux. Combien de temps prenez-vous pour créer une œuvre? En commencez-vous plusieurs à la fois? Je ne suis pas minutieux mais rigoureux ! Tout ce que je fais est voulu. Je sais très exactement ce que je veux faire.... j’ai la certitude pour avancer et l’incertitude pour douter ! Je peux travailler très lentement ou très vite, cela dépend de la technique employée. Il m’arrive souvent de travailler plusieurs toiles à la fois car cela me fait gagner du temps. Pendant que les jus et les glacis sèchent, je commence une autre œuvre. Le support semble très important pour vous ! Pourriez-vous nous en expliquer la raison ? Le support est un élément constitutif de l’œuvre donc ,dés le départ, il occupe une place très importante pour moi .J’aime le support comme le carton d’emballage...un support qui a vécu! C’est ma façon à moi, de dire que l’on peut faire de l’art avec n’importe quoi! Si vous deviez exprimer un sentiment par rapport à cette exposition, lequel serait-il, à part le silence? C’est à vous de me dire quel sentiment vous inspire mes
œuvres ! Je fais une peinture pour les personnes qui regardent mon
travail. Je ne donne pas de titre à mes œuvres pour laisser le
spectateur avec son imagination. Que pensez-vous du minimalisme? L’art du minimum, la philosophie Zen (le souffle) moins on en montre, plus on en dit ! Je ne me considère pas comme un peintre minimaliste,
mouvement qui est venu des États-Unis. Moi je suis un peintre du minimum…minimum
dans mes couleurs, dans mes formes, dans mes gestes, dans mes supports
avec le papier kraft. Je ne mets rien de plus que ce qu'il faut mettre. Je
suis quelqu'un qui enlève et j'opacifie pour arriver à simplifier, à
cacher mais en faisant de sorte que cela reste lisible...Je n'aime pas les
choses figées, j'aime qu'une œuvre change par rapport à la lumière, au
regard... Elles sont verticales par nécessité. Cela est symbolique: l’horizontal, c’est le calme et la verticale, c’est la chute ou l’élévation. Je travaille aussi avec des polyptyques en mettant plusieurs tableaux cote à cote. J'ai observé que vous n’utilisiez pas de lignes courbes. Quelle en est la raison ? Effectivement, mes lignes sont brisées car au départ, il y a le pliage. Je plie quinze fois verticalement puis quinze fois horizontalement et en dépliant, cela produit des traits en «relief» qui sont accentués avec l’application de la couleur. Mes œuvres sont toutes travaillées de la même façon. |
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