D. Maigné |
P. Delinière |
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Aperçu , en PDF ... du vernissage (soirée du 17 octobre 2009) des visites de classes (et du travail d'écriture dans la galerie) de la nocturne (du 12 novembre avec Roland Pastoureau et son luth)
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Présentation de l'exposition par Anto Alquier | Entretien avec les élèves | |
Exploitation pédagogique (format PDF) | ||
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Daniel Maigné et Pierre
Delinière sont gersois. Installés comme photographes, l’un à Lombez
(1981), l’autre à Vic-Fezensac (1975), ils sont réunis ici pour leurs
images personnelles réalisées en marge de leur métier. Les clichés
sont pris dans leur village -« à domicile »- en noir
et blanc, avec un appareil argentique, et tirés sur papier baryté. Cet
ensemble d’images constitue un patrimoine de valeur que nous souhaitons
faire découvrir et apprécier pour son authenticité et sa sincérité. La série de photographies de Daniel Maigné, fait partie des collections de la Conservation Départementale du Patrimoine et des Musées du Gers. Elle nous est aimablement prêtée par son conservateur, Michel Hue. Elle est composée de quinze photographies réalisées depuis le domicile de leur auteur qui surplombe la cathédrale de Lombez. Les prises de vue au 6x6, sont faites depuis un même endroit : une pièce de la maison , à travers une fenêtre dont les vitres datent du XVIIème siècle, et à différents moments de l’année et de la journée. On pense à Cézanne en prise avec la montagne Sainte Victoire et à Joseph Sudek qui traquait la lumière de son jardin tout au long des saisons à travers la buée et le givre des carreaux de son atelier! A partir de ce dispositif photographique : l’appareil, la fenêtre, le sujet-cathédrale, fixes et immobiles, Daniel Maigné choisit le cadrage, la mise au point, la présence ou non de l’écran-fenêtre et la qualité de la lumière. Sur le miroir dépoli de l’appareil il compose une scène où la théâtralité se conjugue avec le mystère. Les imperfections du verre antique qui s’interpose entre l’œil et le sujet, produisent du flou, des déformations et des vibrations lumineuses. Le regard est perturbé, une autre réalité émerge, inattendue et surprenante. On ressent l’amoncellement du temps, son épaisseur, sa densité et la pérennité des choses, leur présence ici et maintenant : la cathédrale, nette, lumineuse, dans l’encadrement des volets entrouverts, et puis leur dilution, leur effacement jusqu’à la disparition : la cathédrale vacille, les murs se délitent, sa silhouette s’estompe jusqu’à se fondre et faire corps avec la vitre. Le temps se dissout, l’intemporel épouse l’instant de la prise de vue. Pierre Delinière a décidé en 1994 de réaliser chaque semaine le portrait d’un vicois et de le montrer dans la vitrine de sa boutique. Ce n’est pas dans une intention marchande, simplement un travail personnel pour un petit bonheur hebdomadaire. Depuis cette date il n’a manqué aucun rendez-vous. Chaque mardi le portrait au 6x7 de l’un d’eux est offert aux passants de la rue avec la mention de son nom. « Le but de ce travail est d’aller à la rencontre des gens de la cité, surtout des anonymes dont la presse ne parle jamais mais dont la présence à Vic est tout aussi importante à mes yeux » dit-il. « Je suis l’anti-paparazzi puisque je photographie des inconnus avec leur autorisation ». En effet, les photos de Pierre sont des photos consenties, dans le lieu de vie ou de travail, dans une pose naturelle, sans les artifices du studio. Il s’agit d’une prise de vue rapide, pleine de fraicheur qui laisse transparaître la bonne relation et la connivence entre le sujet et le photographe. Sans recadrage au moment du tirage, elles renvoient ce que l’œil a saisi spontanément. Si « au début il n’était pas évident d’aller chez les gens pour les photographier car il ne comprenait pas bien la démarche, leur approche est beaucoup plus facile aujourd’hui ». Confiance et respect président à cette démarche d’inventaire de Pierre Delinière qui nous renvoie à Doisneau ou August Sander. A ce jour sa collection compte un bon millier de clichés, un vrai trésor qui dépasse l’histoire de la communauté vicoise par sa portée sociologique et humaine. Pierre perpétue une certaine photographie humaniste où l’être humain est d’abord une personne avant d’être un sujet de photo et son engagement mérite considération. Anto Alquier |
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ENTRETIEN AVEC M. MAIGNE ET M. DELINIERE ET LES ELEVES
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Quel genre de photographie n’aimeriez-vous pas faire? M. Delinière : J’aime tout photographier, la seule chose que je n’aimerais pas faire, ce sont les photographies de paparazzi qui volent les images de personnes.M. Maigné : je n’aimerais pas faire des reportages de guerre!
M.Delinière : J’aimerai comprendre la mise en scène de la photographie n°11 Celle ou un homme semble sortir d’un monticule de bouteilles plastique? J’étais à la déchetterie de Vic Fezensac, un employé dans un bac, récupérait des bidons qui n’auraient pas dû être là. Je lui ai demandé de lever la tête et je l’ai pris en plongée!
M. Delinière : Certaines de vos photographies me font penser à un tableau. Pourriez- vous nous expliquer ce qu'est, pour vous, la différence entre une peinture et une photographie? Le peintre crée entièrement. Le photographe passe par un outil qui représente son œil. M. Maigné : la différence est dans l’outil, on a tous envie de créer et chacun prend l’instrument qui lui convient pour réaliser sa création.
M. Maigné, M.Delinière, pouvez-vous nous dire entre vous les différences et les points communs? M. Maigné : Nous sommes assez différents l’un de l’autre. La série présentée ici est très ponctuelle et a assez peu de choses à voir avec ce que je fais. Mais, en ce moment, j’ai besoin de prendre du recul, de me retirer, je me cache…d’où ces clichés immobiles, intemporels.M. Delinière : Je vais plutôt vers les autres, je travaille à l’extérieur. Mes photographies expriment le quotidien, le mouvement et la vie. Nos points communs sont l’amour de la photographie et le travail avec des appareils photographiques argentiques. Un autre point commun : travailler dans notre région "le Gers" Et aussi, avoir pris notre première photographie vers l’âge de dix, douze ans !
M. Delinière, que vous apporte le travail en noir, gris et blanc ? La couleur ne m’apporterait rien de plus. La photographie, en noir et blanc, permet d’aller à l’essentiel. Grâce à la lumière, nous pouvons obtenir une très grande variation de noir, gris et blanc.
M. Maigné, la mise au point, semble importante pour vous ? Pouvez vous nous en parler ? Pour moi, c’est une question de questionnement. La mise au point, par exemple, sur une vitre avec un paysage flou derrière, veut dire "je suis bien chez moi et ce qui se passe à l’extérieur ne m’intéresse pas "
M. Maigné , le thème de la fenêtre est dans toutes les photographies exposées. Que représente pour vous ce passage "intérieur extérieur" Cela représente pour moi un retrait du monde. Je voulais rester chez moi, ne pas bouger mais continuer à faire de la photographie.
Comment avez-vous commencé votre carrière dans la photographie? M. Delinière : J’ai commencé en 1968 mon frère m’a offert un "cosmic 35" Ce qui m’a donné l’envie de faire de la photographieM. Maigné : C’est une rencontre qui m’a donné envie de faire de la photographie Nous ne sommes pas vraiment des autodidactes car nous avons, tous les deux, suivi un apprentissage qui nous a permis de devenir "professionnels"
M. Maigné et M. Delinière, pouvez vous nous expliquer ce qu’est une photographie réussie? Le plus important c’est qu’elle transmette quelque chose ! Que celui qui la regarde éprouve un sentiment, une curiosité,un étonnement, une surprise, un dégoût etc. M. Maigné, est- il plus facile d’éditer des catalogues de photographies plutôt que d’organiser des expositions? Je préfère éditer des livres car pour moi cela représente un travail fini, clos, tout est dedans…par contre on perd un peu dans la qualité des clichés. Un livre qui a du succès (par exemple"carré Ovale" 15000 personnes peuvent l’acheter, beaucoup moins de gens vont visité une exposition! Une exposition est pour moi plus compliquée à mettre en forme. Je dois souvent faire des modifications par rapport à mon projet initial, de plus, une exposition est éphémère, elle ne dure pas comme un livre!
M.Maigné,vos vitres anciennes, en elles mêmes, peuvent devenir le sujet de vos photographies. Qu’en pensez vous? C’est déjà le sujet (à part deux photographies ou les fenêtres sont ouvertes) car grâce à elles on peut situer l’endroit Elles datent du 17ème siècle et sont pleines de défauts, de cassures, de bulles. En faisant la mise au point sur elles, cela permet de faire une infinité de variations grâce à la lumière à travers les vitres. Elles représentent aussi un écran qui me permet de ne plus voir le monde qu’il y a derrière.
M. Maigné et M. Delinière, un bon appareil ne fait pas un bon photographe ! Mais à votre avis sans un bon appareil peut-on faire de bonnes photographies? M. Maigné : Oui, mais plus difficilement et le résultat, techniquement, sera peut être moins parfait. Mais de très grands photographes ont fait de superbes photographies avec un appareil jetable ! C’est surtout l’intention, l’envie de raconter qui compte.
M.Delinière, en regardant vos photographies, j’ai du mal à savoir quelle lumière vous utilisez . Pouvez vous nous en parler ? Plusieurs sources lumineuses sont utilisées. Il y a celle du projecteur, d’une baladeuse et la lumière naturelle.
M. Maigné ,certaines de vos photographies sont à la limite de l’abstraction. Est-ce un objectif pour vous ou une façon différente de prendre la cathédrale de Lombez (celle-ci devenant pratiquement invisible) Non, l’abstraction ne m’intéresse pas. Ces photographies sont des "accidents". Les vitres anciennes déforment énormément et grâce à un jeu d’optique cela donne un résultat effectivement proche de l’abstrait mais encore une fois, ce n’est pas le but recherché ! Je veux garder un lien avec le figuratif.
M. Maigné,certaines de vos photographies semblent recadrées. Pouvez vous nous expliquer l’importance du cadrage dans votre travail ? Deux photographies ne sont pas recadrées, celles ou la fenêtre est ouverte. Sinon comme les carreaux sont rectangulaires et que j’utilise du 6/6 je suis forcement obligé de recadrer pour n’avoir que la structure de la fenêtre et pas mes murs sur les côtés. Cadrer, c’est choisir et choisir c’est souvent renoncer (enlever certaines parties qui n’apportent rien de plus).
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